vendredi 25 décembre 2020

JOUR DE NOEL 2020

Frères et sœurs, imaginons un Noël sans crèche, sans anges, sans bergers, sans gloria… Manifestement ce n’est pas Noël ! Pourtant c’est ce que l’évangéliste St Jean nous sert en ce matin de Noël : la crèche, les bergers, les anges et leur gloria, rien de tout cela dans son récit. Tout ce qui fait Noël a subitement disparu. A la place, un récit poétique aride, un texte tout aussi dense que rebutant.

J’avoue humblement et à voix basse que j’ai eu la tentation, par pitié pour vous, de zapper habilement l’évangile de ce jour pour vous parler de choses plus exaltantes. Je n’ai pas osé mais j’ai trouvé une porte de sortie.

Pour rendre le texte moins aride, je vous propose l’astuce suivante : plaçons-nous devant la grotte de Bethléem qui est notre crèche ici ; et devant le nouveau-né de Bethléem, laissons résonner en arrière fond les versets déclamés de l’Evangile de St Jean.

« Au commencement était le verbe, et le verbe était auprès de Dieu

Le Verbe s’est fait chair et il a habité parmi nous ! »

En entendant ces mots devant le bébé de Bethleem, on ne peut que porter la main à la bouche, écarquiller les yeux de stupeur. Ce bébé, c’est donc lui le Verbe de Dieu ? C’est Dieu fait chair ! C’est l’éternité temporalisé ! L’invisible rendu visible. Dieu cesse de loger dans les nuées célestes pour élire domicile sur la terre et dans la chair.

L’humanité devient le sanctuaire de la divinité ; la terre ravit au ciel une partie de son monopole de la divinité. Pour le contempler, pour contempler Dieu, point n’est besoin de s’évader du monde, de scruter les sphères célestes. Il git là dans l’enfant de Bethléem ; il git en tout homme redevenu grâce à l’incarnation et à la rédemption l’icone vivant de Dieu sur terre. Nous sommes divins ; nous devons en être convaincus.

On raconte que des voleurs avaient fait effraction dans une église paroissiale et jeté à terre les hosties consacrées, avant de dérober le ciboire. La paroisse demanda à Mgr Dom Helder Camara, alors archevêque de Recife de présider une célébration de réparation. Dom Helder accepta et prononça le jour venu la prière suivante : « Seigneur, au nom de mon frère le voleur, je demande pardon. Ce qu’il a fait nous touche profondément. Mais mes amis, mes frères, comme nous sommes tous aveugles ! Nous sommes choqués par ce que notre frère, ce pauvre voleur, a jeté les hosties, le Christ dans la boue. Mais dans la boue vit le Christ tous les jours chez nous dans le pauvre, l’opprimé. Il nous faut ouvrir les yeux ».

L’homme par l’incarnation et la rédemption redevient le miroir vivant de Dieu sur terre. Voilà la merveille que nous célébrons en ce jour !

Dieu en s’identifiant ainsi à l’homme semble être allé trop loin au point de susciter de l’incompréhension. Résultat : on l’a loupé ; on a loupé son mystère.

« Il était dans le monde mais le monde ne l’a pas reconnu ;

Il est venu chez lui et les siens ne l’ont pas reçu ! »

Jean qui écrit ces mots a effectivement vécu le rejet de Jésus par les siens, le rejet d’un messie si banal, d’un Dieu trop humain. A qui la faute ? Aux hommes ? A la pédagogie divine ?

C’est vrai Dieu aurait pu procéder autrement : imposer l’évidence de l’incarnation à tous ; déchirer les cieux et descendre en force comme pour répondre à l’appel pressant du psalmiste : « Ah ! Si tu déchirais les cieux et tu descendais » !

Mais non ! Dieu opte de ne pas s’imposer ; il prend le risque de ne pas être reconnu. Etonnante pédagogie divine ! Et pourtant rien d’étonnant ! La discrétion est son mode opératoire privilégié. La plupart des grands mystères, des événements fondateurs de notre foi se passe dans la discrétion : l’incarnation : incognito ! La résurrection : sans témoins oculaires !

Dieu entre dans le monde à pas feutrés ; c’est l’incognito de Dieu. Son entrée sans fracas et sans tambours battant appelle le saut de la foi. Pour le percevoir dans cet enfant devant nous, il faut plus que des lunettes (ceux qui en portent, vous n’avez aucun avantage sur les autres) il faut des yeux de la foi.

Demandons à Jésus d’ouvrir nos yeux pour le reconnaître au cœur de notre vie, au cœur de l’opacité de notre humanité. Demandons-lui d’ouvrir aussi nos cœurs à la beauté, à la profondeur de ce mystère et à ses exigences. Car derrière l’incarnation se cache pour nous un devoir-être : laisser transparaître Dieu dans notre humanité, être à la hauteur de notre filiation divine, être de dignes frères de Jésus. Puisse-t-il en être ainsi pour chacun et chacune de nous. Amen !

 

Introduction : Le Christ né aujourd’hui à Bethléem se présente à nous comme l’Emmanuel « Dieu avec nous ». Forts de sa présence au sein de notre humanité, implorons son secours.

 

Prière conclusive : Seigneur par ton incarnation tu te fais si solidaire de l’homme que tu épouses notre nature afin d’assumer nos détresses humaines, sois attentif à nos appels au secours et écoutes-nous, Toi qui vis et règnes pour les siècles des siècles.

Abbé Pascal KOLESNORE

 

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